Optimiser l’efficacité énergétique des logiciels : les principes de l’écoconception numérique

Dans un premier volet, nous avons exploré les bases du Numérique Responsable. Dans ce deuxième épisode, nous allons nous concentrer sur l’un des aspects clés de cette approche : l’écoconception numérique.

L’écoconception numérique vise à intégrer les enjeux environnementaux dès la conception d’un produit ou service, et ce, tout au long de son cycle de vie. Cette démarche d’amélioration continue a pour objectif de réduire l’impact écologique des services numériques, qu’il s’agisse de logiciels, d’applications ou de dispositifs connectés. Avec la croissance exponentielle du secteur numérique au cours des deux dernières décennies, les répercussions environnementales liées au numérique ont considérablement augmenté, notamment avec la prolifération des objets connectés et l’essor de l’intelligence artificielle.

Face à ces défis, il est essentiel de mettre en place des stratégies écologiques, des méthodes d’optimisation de l’impact environnemental et des actions concrètes pour limiter cette empreinte. C’est dans ce contexte que l’écoconception numérique joue un rôle déterminant, en contribuant à la réduction des impacts écologiques tout en optimisant la performance énergétique et la durabilité des services numériques.

1. L’ECOCONCEPTION

Les utilisateurs consomment le numérique de manière plus fréquente et à une échelle bien plus grande qu’il y a 20 ans. En conséquence, les services numériques sont devenus plus complexes, puissants et énergivores. Depuis les années 90, le secteur a connu une expansion spectaculaire, le poids moyen d’une page web a notamment été multiplié par 191 entre 1995 et 2024. Plusieurs facteurs expliquent cette croissance : complexité de la navigation, augmentation des flux d’information, intégration de médias lourds, et services souvent mal adaptés aux besoins réels des utilisateurs. À chaque étape de la conception d’un service, des choix doivent être faits en faveur de l’écologie.
La stratégie est essentielle dans la conception d’un produit numérique. Définir une approche éco responsable, avec des objectifs clairs et des méthodes adaptées, permet d’intégrer dès le départ la dimension environnementale et d’aligner la vision de l’entreprise avec les enjeux environnementaux.

L’écoconception doit être intégrée dès la phase de réflexion. Il est crucial de se demander si un site ou une application est réellement nécessaire et s’il existe une alternative plus simple et moins énergivore. Cela permet déjà de limiter l’impact environnemental dès le début du projet. Si un service numérique est indispensable, il doit être conçu de manière responsable.

Pour une conception éco-responsable, plusieurs éléments doivent être pris en compte dès le départ : la cible est-elle bien définie pour répondre précisément à un besoin, sans superflu ? Le service utilise-t-il un hébergement éco-responsable ? Les mises à jour sont-elles optimisées pour réduire la consommation énergétique ? Autant de questions qui doivent guider les équipes avant, pendant et après le développement. L’écoconception ne se limite pas à une interface légère ou à une UX (User Experience) optimisée, mais inclut l’ensemble du projet, de la conception à l’implémentation, en réduisant les impacts environnementaux à chaque étape, qu’il s’agisse de l’infrastructure, de l’architecture ou des stratégies employées

2. LE RGESN - LE RÉFÉRENTIEL POUR CONCEVOIR PLUS RESPONSABLE

En mai 2024, un premier référentiel officiel a été publié dans le cadre de la mission
interministérielle « Green Tech », co-pilotée par la Direction interministérielle du numérique (DINUM), le ministère de la Transition Écologique, l’ADEME et l’Institut du Numérique Responsable. Le RGESN (Référentiel Général d’Écoconception des Services Numériques) constitue désormais la référence pour l’audit de conformité des services numériques. Ce référentiel repose sur une série de critères à valider, organisés en 9 catégories principales : Stratégie, Spécifications, Architecture, Expérience et Interface utilisateur (UX/UI), Contenus, Frontend, Backend, Hébergement, et Algorithmie. Chacune de ces catégories représente un domaine ou un métier concerné par les actions d’écoconception.

Au total, le RGESN inclut 78 critères qui visent à accompagner les organisations dans
l’élaboration et le déploiement de services numériques écoconçus. Pour chaque critère, une question est posée, et il est attendu une réponse parmi les trois suivantes :

• « Oui » : Indique que le critère contribue positivement à la réduction des impacts
environnementaux.
• « Non » : Indique que le critère présente un impact défavorable sur l’environnement.
• « Non applicable » : S’applique dans des cas particuliers, mais nécessite une justification.

En complément, le RGESN fournit des explications détaillées pour chaque critère, afin de guider les entreprises dans la mise en œuvre de bonnes pratiques écologiques. Par exemple, pour chaque critère, des informations précises sont fournies sur les actions à entreprendre pour réduire l’empreinte écologique d’un service numérique :

3. PAR OÙ COMMENCER ?

Chaque critère du RGESN est classé selon son niveau de difficulté et sa priorité. Cela permet d’identifier facilement les actions à privilégier pour une première approche : les critères simples à mettre en œuvre mais ayant un impact significatif. En tout, 30 critères appartiennent à cette catégorie, offrant ainsi un point de départ stratégique pour initier la démarche d’écoconception.

Parmi ces critères, 7 sont identifiés comme des « Quick Wins » :

– « Le service numérique a-t-il défini ses cibles utilisatrices, les besoins métiers et les attentes réelles des utilisateurs cibles ? »

– « Le service numérique comporte-t-il uniquement des animations, vidéos et sons dont la lecture automatique est désactivée ? »

– « Le service numérique utilise-t-il, pour chaque vidéo, une définition adaptée au contenu et au contexte de visualisation ? »

– « Le service numérique utilise-t-il une stratégie d’inférence optimisée en termes de
consommation de ressources et des cibles utilisatrices ? »

– « Le service numérique optimise-t-il l’occurrence de mise à jour et de réentrainement des modèles en fonction de ses besoins et des cibles utilisatrices ? »

– « Le service numérique limite-t-il la quantité de données utilisées pour la phase d’apprentissage
au strict nécessaire ? »

– « Le service numérique a-t-il interrogé la nécessité d’une phase d’entrainement pour éviter un usage non justifié et déraisonné ? »

Ces éléments sont parmi les plus simples à mettre en œuvre, tout en ayant un fort impact
écologique.

Le RGESN propose des critères accessibles aux acteurs du numérique, qui peuvent souvent être remplacés par des alternatives écoconçues. Voici quelques exemples à envisager.

Exemple 1 : « 4.4 – Le service numérique permet-il à l’utilisateur de décider de l’activation d’un service tiers ? »
Les services tiers (comme les cartes ou les réseaux sociaux) sont très énergivores, car leur
intégration multiplie les requêtes entre la plateforme et le service tiers. Il est recommandé de limiter leur utilisation pour réduire l’empreinte écologique.
Alternatives :
• Utiliser des composants internes (par exemple, afficher vos icônes de réseaux sociaux sans faire appel à un tiers).
• Afficher des avis statiques au lieu de charger des données en temps réel.
• Ne pas afficher de carte, ou privilégier des services moins gourmands comme OpenStreetMap.

Exemple 2 : « 4.2 – Le service numérique affiche-t-il uniquement des contenus sans défilement infini ? »

Le défilement infini consomme beaucoup d’énergie. Mais plusieurs alternatives existent pour limiter cette consommation :

• Pagination : charge le contenu par pages, réduisant la quantité de données chargées d’un coup.
• Lazy loading : charge les éléments au fur et à mesure que l’utilisateur fait défiler la page, ce qui réduit la consommation d’énergie. Si l’utilisateur reste en haut de page, alors le contenu en dessous ne charge pas. Cette pratique est couramment utilisée en écoconception en raison de son efficacité

Conclusion

L’écoconception n’est pas une démarche ponctuelle, mais un processus continu qui se déploie tout au long d’un projet numérique. C’est pourquoi, pour initier une approche éco-responsable, il est conseillé de commencer par des actions simples et rapidement réalisables, comme les 7 Quick Wins. Ensuite, à mesure que l’équipe gagne en expérience et en expertise, il est possible d’aborder des actions plus complexes et de cocher de nouveaux critères.

L’objectif est de suivre les recommandations du RGESN pour rendre le numérique plus responsable. Le premier pas vers cette transformation consiste à adopter une vision globale du numérique responsable et à s’engager activement dans une démarche d’écoconception. Une fois cette volonté établie, vous disposez des clés nécessaires pour définir une stratégie adaptée et développer des produits et services numériques plus respectueux de l’environnement.

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