Tarif réglementé, heures pleines & creuses, contrat flexible, les offres se multiplient ces dernières années concernant la fourniture d’électricité en France avec notamment l’apparition de fournisseurs toujours plus compétitifs et intégrant à leurs offres des promesses d’électricité Verte sur base de garanties d’origine.
Si le choix d’un contrat est une entreprise complexe il est pour autant nécessaire de débuter par la compréhension de ce que représente la facture d’électricité, ce qu’elle intègre et qui elle rémunère. Cet article vise à décrire les mécanismes à l’œuvre dans la facturation de l’électricité en France.
L’électricité de la production à sa fourniture
Basiquement l’électricité correspond au déplacements de charges (électrons) dans un circuit et permet les changements d’états dans des systèmes (éclairage, transport de charge…). En France, dans le mix de consommation finale d’énergie (énergie directement utilisée par le consommateur finale) l’électricité représente environ 25% de l’énergie utilisée.
Production
La production d’électricité en France est majoritairement assurée par la filière nucléaire, voici un graphique présentant l’évolution des productions par filières sur les 5 dernières années La France à produit quasi 500 TWh pour 2023.
Transport et distribution
L’équilibrage du réseau étant complexe à gérer en raison notamment de l’intermittence des moyen de production durables (solaire, éolien, …) et des opérations de maintenance (comme pour garantir le fonctionnement optimal des réacteurs nucléaires), la France peut parfois importer une partie de son électricité qu’elle injecte dans le réseau. Une fois l’électricité produite, elle est transportée (très haute tension de 63 à 400 kV) par RTE (Réseau de transport de l’électricité) puis distribuée (moyenne et basse tension soit de 230 V à 30kV) par Enedis vers les bâtiments et compteurs privatifs. Selon les besoins d’un site (locaux tertiaire, habitation) le raccordement de puissance n’est pas le même et le compteur sera adapté au domaine de tension cible (HTA = gros professionnels, BT sup = Gros particuliers + Petits professionnels et BT inf = particuliers)
Fourniture
Historiquement l’électricité faisait partie du domaine public et était produite et distribuée par Electricité de France (EDF) en France ; depuis l’ouverture à la concurrence (depuis le 1er juillet 2007 pour les particuliers et professionnels) le marché de l’électricité français reste dominé par EDF mais est concurrencé par des fournisseurs alternatifs tels que Engie, Total Energies ou Eni.
Également depuis le 8 novembre 2019, L’article 64 de la loi n°2019-1147 relative à l’énergie et au climat (LEC) met fin aux tarifs réglementés de vente d’électricité des fournisseurs historiques. A compter du 1er janvier 2021, les sites dont la puissance de raccordement est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères peuvent bénéficier des tarifs réglementés de vente d’électricité. Une nuance toutefois, il ne s’agit pas de tous les sites mais uniquement des suivants :
- Consommateurs finaux domestiques, y compris les propriétaires uniques et les syndicats de copropriétaires d’un immeuble unique à usage d’habitation
- Consommateurs finaux non domestiques qui emploient moins de dix personnes et dont le chiffre d’affaires, les recettes ou le total de bilan annuels n’excèdent pas 2 millions d’euros.
Finalement si historiquement EDF pratiquait un tarif réglementé pour la fourniture, fixé par l’état sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), désormais la situation du marché évolue donc et de nouveaux tarifs sont proposés, il s’agit du marché de détail de l’électricité. Plusieurs formats de contrats sont également envisageables, comme la base ou le tarif est unique, le format heure pleine ou creuse qui distingue deux prix du kWh consommé selon les heures de la journée ou bien les offres, plus récentes, qui intègre de la flexibilité. Ces contrats flexibles impliquent davantage le consommateur en l’incitant à réduire ou déplacer ses consommations certains jours ou le réseau de fourniture est tendu en France (jours dits « Sobriété »). La flexibilité peut être entreprise à plusieurs niveaux selon la typologie d’acteur (particulier, industriel, …) et selon des mécanismes qui dépend des puissances engagés (NEBEF, Agrégateur, notification fournisseurs, …).
Composition d'une facture
Après avoir décrit succinctement le fonctionnement du marché de l’électricité en France, de sa production à sa fourniture il est intéressant de se focaliser sur les services facturés par les fournisseurs et que l’on retrouve dans sa facture. Une facture se compose de trois éléments, fourniture, acheminement et taxes et l’on pourra retenir que chacun représente 1/3 du cout total facturé ; toutefois les taxes, le TURPE et le prix de la molécule étant tous variables en fonction des contraintes du marché, ces répartitions peuvent être amenés à changer au cours du temps.
Fourniture
Une facture intègre deux parties distinctes pour la fourniture, une fixe et une variable. La partie fixe correspond à l’abonnement, qui dépend notamment de la puissance souscrite et la part variable qui dépend du volume d’énergie consommée sur la période facturée. Selon le contrat et le découpage horosaisonier du prix (base, heures pleines & creuses, Pointe et détail heures pleines & creuses saisons été & hiver).
Pour exemple voici le tarif bleu EDF, pour accès au réseau public de distribution à destination des clients résidentiels qui bénéficient du tarif réglementé au 01/02/2024 :
Acheminement
En 2000, à la séparation de la production et de l’acheminement de l’électricité en France, le TURPE ou tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité a été créé. Ce tarif assure une rétribution du consommateur (via le fournisseur) au réseau de transport de l’électricité (RTE), Enedis le gestionnaire de réseaux de distribution, GRD principal en France couvrant 90% du réseau, et les entreprises locales de distribution (ELD). Cette rétribution porte sur l’exploitation, l’entretien et le développement des réseaux. Le montant de la part dédié à l’acheminement dans la facture fluctue autour de 30% et est fixé par la CRE.
La partie acheminement intègre différents couts :
- Composante de gestion (CG) : La composante annuelle de gestion couvre les coûts supportés par les gestionnaires des réseaux publics de distribution pour la gestion des dossiers des utilisateurs, l’accueil physique et téléphonique, la facturation et le recouvrement.
- Composante de comptage (CC) : La composante annuelle de comptage couvre les coûts de fourniture, de pose et d’entretien des dispositifs de comptage, les coûts de contrôle, de relève et de transmission de données de facturation et les coûts liés au processus de reconstitution des flux. La composante annuelle de comptage dépend du niveau de tension.
- Composante de soutirage (CS) : La composante annuelle de soutirage est définie sur la base d’une allocation de coûts, de manière à ce que le tarif payé par chaque utilisateur reflète au mieux le coût de réseau qu’il génère. Le signal tarifaire transmis aux utilisateurs doit permettre d’optimiser à moyen terme les besoins d’investissements et les charges d’exploitation des réseaux.
- Composante mensuelle des dépassements de puissance souscrite (CMDPS) : La composante mensuelle des dépassements couvre le coût des dépassements de puissance appelée par l’utilisateur au-delà de sa puissance souscrite.
- Composante annuelle des alimentations complémentaires (CACS) : Une alimentation de secours est une ligne maintenue sous tension et utilisée uniquement en substitution d’une ou plusieurs lignes principales indisponibles en cas de défaillance, de réparation ou de maintenance. Sa facturation est établie en fonction de la longueur des ouvrages électriques qui la composent.
- Composante de regroupement (CR) : Les utilisateurs disposant de plusieurs points de connexion dans le domaine de tension HTA (sur un même site) peuvent, s’ils le souhaitent, bénéficier du regroupement tarifaire pour le calcul des composantes des injections, de soutirage et des dépassements, ainsi que la composante d’énergie réactive.
- Composante annuelle de l’énergie réactive (CER) : La tarification prévoit de facturer l’énergie réactive soutirée pendant les heures de pointe et les heures pleines de saison haute (mois de novembre à mars) pour la partie qui dépasse 40 % de l’énergie active consommée pendant la même période.
- Composante annuelle des injections (CI) : La composante annuelle des injections est facturée pour chaque point de connexion en fonction de l’énergie active injectée sur le réseau public de distribution.
Taxes et contributions
Plusieurs taxes sont appliquées sur les factures des consommateurs d’électricité en France. Ces couts sont fixés par le Code de l’énergie.
- Contribution au service public de l’électricité (CSPE) : Cette contribution, sert à dédommager les opérateurs du surcout engendré par les obligations imposées par la loi sur le service public de l’électricité. Cette taxe est recouvrée par la Direction générale des finances publiques depuis début 2022. Elle permet le financement des politiques de soutien au énergies renouvelables, la cogénération (production chaleur et électricité), le soutien à l’injection de biométhane dans les réseaux de gaz, une partie des surcoûts de production d’électricité dans les zones non interconnectées (ZNI) au réseau électrique métropolitain (Corse, DOM, îles bretonnes…) et enfin Les tarifs sociaux du gaz et de l’électricité.
- Contribution tarifaire d’acheminement (CTA) : La CTA est la Contribution Tarifaire d’Acheminement. Cette taxe est destinée au financement des retraites des employés des Industries électriques et gazières (IEG), il s’agit des agents de deux entités,
- EDF (Électricité de France),
- GDF (Gaz de France, aujourd’hui Engie),
Seuls les droits acquis avant le 1er janvier 2005 sont concernés. Cette taxe a été mise en place en 2004.
Toutes ces taxes sont majorées par la TVA. Si la TVA s’applique à hauteur de 5,5% sur la partie abonnement, elle s’applique à 20% sur la consommation et les CSPE.
Comment agir pour diminuer sa facture d'électricité
Dans le contexte actuel en France, les prix de l’énergie s’envolent pour des motifs variés, contextes géopolitiques tendus, maintenance de réacteurs nucléaires, etc… Tout ceci pousse de nombreux particuliers et entreprises à tâcher d’agir pour réduire le montant de leur facture, voici quelques méthodes,
- Analyser ses consommations : Une analyse fine de ses consommations par usage (chauffage, éclairage, climatisation, …) peut permettre de déterminer les pôles les plus impactant dans la facture et ainsi envisager des actions (maintenance, travaux, …) visant à l’amélioration de sa performance énergétique. Également l’utilisation d’EMS (énergie management system) pour les entreprises, accompagne les études d’Energy management et l’identification des talons, part thermosensible ou autres caractéristiques d’un bâtiment.
- Benchmark fournisseurs : Depuis l’ouverture du marché à la concurrence un grand nombre d’offres sont désormais disponibles et il est rapidement possible, via des outils disponibles sur internet, de comparer les offres et opter pour la plus avantageuse. Pour les particuliers et entreprises sensibles aux démarches RSE, des fournisseurs plus responsables existent et sont répertoriés par l’Ademe sous le label « VertVolt »
- Optimisation puissance souscrite : Il est très fréquent que des entreprises aient engagés des contrats avec leurs fournisseurs impliquants des puissances souscrites plus hautes que nécessaires sur leurs compteurs. Une analyse de sensibilité et d’optimisation sur ces contrats permet de déterminer (sur une année complète) les puissances les plus cohérentes afin de minimiser la partie Turpe (acheminement) des factures.
De nouveaux mécanismes comme la flexibilité peuvent également permettre à des consommateurs (particuliers ou entreprises) de bénéficier de tarifs plus intéressants sur la consommation en échange de disponibilité pour effacer ou déplacer leurs consommations.